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lundi 17 mars 2008

Des « Complaintes d'esclaves » aux complaintes pour Massillon Coicou

15 mars 1908 - 15 mars 2008 : cent ans déjà que la disparition tragique de Massilon Coicou a fait une énorme brèche au monde littéraire haïtien. Mort sanglante, lâche, assassine, révoltante, subie par Coicou au nom de l'amour qu'il a toujours exprimé pour sa patrie, objet de son culte sacré.

Sale boulot ! La nuit du 14 au 15 mars 1908 aura laissé un souvenir macabre de cet écrivain dont le nom désormais demeure, selon Ghislain Gouraige, comme le symbole de la résistance à la tyrannie des médiocres. Ecourter la vie d'un barde si prometteur, réduire son existence à seulement 41 ans, l'arracher de son lit en pleine nuit, le conduire devant le mur du cimetière pour enfin le livrer au spectacle des balles du peloton d'exécution, voilà un acte barbare qui continue encore de révolter la conscience de plus d'un.

On dirait que le carillon des canons se prolonge dans l'atmosphère, laissant entendre par moment les cris perçants d'un combattant fusillé, pris au dépourvu.

Certes, Massillon Coicou avait prédit sa mort dans « Complaintes d'esclave » : « De mon sang, de mes pleurs, il faut que tout s'enivre !... » Effectivement, à côté de ses frères Horace et Louis, le 15 mars 1908 le sol maudit s'est enivré de son sang et de ses pleurs.

Mais cette mort tragique qu'il a connue a-t-elle été vraiment cette « mort jalouse et si prompte au devoir » qu'il évoquait avec tant de fermeté dans « Complaintes d'esclaves » ?Cette mort cruelle n'a rien à voir avec le devoir. En effet, si Coicou souhaitait tant mourir dès le sein de sa mère, c'était justement pour ne pas avoir connaissance de la situation inhumaine que vivait l'esclave à Saint-Domingue.

Etant donc sensible aux souffrances de ses frères et de sa race, sa conspiration contre le régime de Nord Alexis par la faute duquel le pays sombrait a été dans ce cas une cause juste.

Ainsi, au lieu d'être un devoir, la mort qu'a connue le poète national est plutôt méchante, destructrice et criminelle, tueuse de rêves et d'espoir.La commémoration du centenaire de la mort de Massillon Coicou, loin d'être un mémorial de deuil, offre plutôt à chacun l'occasion de revisiter l'oeuvre de ce dernier faite de poésie, de roman et de théâtre, et de méditer sur chaque mot qu'il prononcé. Une manière de lui rendre justice, cent ans après.

Lucmane Vieux

http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=55535&PubDate=2008-03-16

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