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samedi 17 novembre 2007

Justin Lhérisson, un siècle après sa mort

par Dulomond Louis
L'homme et son temps
Né le 10 février 1873, à Port-au-Prince, Lhérisson est le produit d'une époque essentiellement corrompue au plan moral comme au plan politique. Après une courte existence de 34 ans, il meurt dans sa ville natale le 15 novembre 1907. Malgré la brièveté de son existence, il a laissé à la postérité deux grands romans : « La Famille des Pitite-Caille » et « Zoune Chez Sa Ninnaine ». Par ses romans et par sa plume éprise de journalisme, ce peintre des moeurs politiques et sociales retrace la peinture d'une société contaminée, pourrie où l'on ne voit que des rejets sociaux et des ratés imposant à tous leurs lois et leurs maximes. Par un effort désespéré, Lhérisson et quelques-uns de ses congénères s'émergent du lot. En eux, du reste, on trouve l'image d'un petit groupe de citoyens qui rêvent de transformer la société et bâtir du même coup un avenir meilleur.
Romancier réaliste de grand prestige intellectuel, Lhérisson à travers ces deux grands romans, déjà, mentionnés nous dit tout. D'ailleurs, point n'est besoin de dire la société de son temps car le pays depuis n'a changé en rien de visage. Du XIXe au XXIe siècle, s'il y a une modification qui se produisit, elle n'a touché que le cours des saisons. Ne dit-on pas qu'il y a en général quatre saisons ? C'est, du moins, ce que l'école nous a appris ! Le bon sens, au contraire, nous montre qu'on n'a pas plus que deux sous le ciel d'Haïti: celle au cours de laquelle il pleut beaucoup et celle durant laquelle il ne pleut que rarement. Mais, à l'heure actuelle, qui peut savoir avec certitude quand on est dans l'une ou dans l'autre de ces saisons ? En vérité personne !

La langue maternelle dans l'oeuvre de Lhérisson
En effet, le premier souci de Lhérisson est de nous introduire dans les trésors de sa langue maternelle, en mettant à nu la culture haïtienne. Et c'est là, l'une des tâches les plus difficiles du romancier. Car, de l'Indépendance à nos jours, la langue maternelle qui est au plan phylogénétique comme au plan pédogénétique la langue de chaque individu, se voyait traitée avec le plus grand mépris et reléguée, après tout, à l'arrière zone. De là, aucun Haïtien ne se croit hors de scandale quand il s'agit de valoriser, sa langue maternelle. Chacun ici, au contraire, traite sa langue avec autant de mépris dont il est capable. En revanche, ne faut-il pas le dire à chacun ? La langue maternelle est la langue de la première socialisation de l'enfant. En devenant un homme, celui qui dévalorise sa langue se dévalorise en même temps. Cependant, Lhérisson même si la critique traditionnelle a vu dans son recours au créole une stratégie visant à faire rire s'émerge, par-là, du lot de la naïveté de son temps. Car il nous fait voir des personnages évoluant dans un cadre réel de langue et de culture qui sont les leurs ! Il importe peu si une petite élite qui n'a ni le moral ni la morale se moque de lui. Connaît-on un Haïtien qui puisse se mettre en colère en français ? A cette question tout savant peut répondre : non ! Car on ne peut exprimer ses émotions profondes que dans sa propre langue et qu'un automatisme quel qu'il soit ne s'exprime qu'en langue maternelle.
Pour exploiter les trésors de cette langue, Lhérisson a dû recourir à une stratégie très efficace. C'est le rire ! En faisant rire, le romancier n'écrit pas seulement pour les « bidonvilles ; il écrit tout aussi pour les salons les plus aristocratisés. Dans « La Famille des Pitite-Caille » comme dans « Zoune Chez Sa Ninnaine », c'est la même langue qui sert de base à la communication. Et quelle communication ? Une communication fructueuse soutenue dans une langue jusque-là, frappée d'interdit de toute sorte. Il est fort curieux d'entendre « Boutenègre » dans un de ses discours : « Dépi l'emprè Choulouque, je m'occupe de polutique ... ». On a là, le cas du chef de Bouquement ! Mais le narrateur lui-même n'est pas, tout à fait, étranger au réseau de communication dans lequel chacun, au besoin, prend la parole. Il laisse couler à grands flots sur ses lèvres des dictons comme : « Causé mandé chita » et, plus significatif encore, « Toute bròdè champête ce lan morne ».
Pour sa part, Pitite-Caille, est un bon orateur. Mais il est presque dépourvu de toute culture. Au cours d'une conférence, n'a-t-il pas relaté : « Serrons nos rangs et crions tous avec Aristote, le grand philosophe français ; Dieu seul est grand mes frères ». Dans le même roman, le grand cri de Ti Couyoute demeure assez significatif : « Mé zanmis, pays frette !!! ».
A quand la levée des interdits sur le créole, notre langue maternelle ?
Cela fait seulement deux ans : Jean-Claude Bajeux et Christophe P. Charles ont créé la surprise, en plaidant pour une académie de langue créole. L'académie, n'est-elle pas l'ennemie de toute langue ? Qui a ignoré que cette institution, en France, a raté sa vocation ? Elle avait au départ, trois missions : faire une grammaire, rédiger un traité de rhétorique et composer un dictionnaire ; si ce n'est la grammaire qui ne sera jamais en usage parce que médiocre cette institution reléguée aujourd'hui au rang de tradition, a failli à toute sa mission. Opter pour une académie du créole, c'est la preuve que la levée des interdits contre cette langue n'est pas pour demain.
La prise en charge du créole traduit encore une autre intention du romancier : de près ou de loin, il semble vouloir placer la théorie de l'école de 1836 dans une dimension plus proche de la pratique. Cette Ecole n'a-t-elle pas prôné la création d'une langue française essentiellement haïtianisée? A notre avis, il y a plus que cela dans l'oeuvre de Lhérisson ! Si le besoin d'une langue se fait sentir, il n'est d'aucun besoin de créoliser une autre pour s'en servir. En conséquence, la génération des critiques à commencer avec Duraciné Vaval pour aboutir à Emile Manigat ou Pierre Pubien que je qualifie de génération de critiques traditionnels, a trouvé l'occasion d'opter pour une littérature d'expression française et cela contre toute possibilité de créer une littérature d'expression créolophone. Si tel est réellement le cas, ils se sont trompés puisque la culture n'a pas de langue propre. Ces critiques, enfin, doivent se taire : « Dezafi » de Franck Etienne, en faisant son chemin prend finalement une dimension littéraire internationale. Est-ce qu'on a de doute là-dessus ?
Du reste, on ne fait pas sur une langue des jugements de goût ; la langue n'est pas un objet d'art mais un objet de recherche scientifique. Et, c'est comme nous dit Ferdinand de Saussure : « La langue est une convention nécessaire et un produit social de la faculté du langage adoptés par le corps social pour exprimer les besoins de la communication ». Les gens qui entendent placer le créole en marge de la réalité linguistique du langage, eux aussi, doivent se taire. Au moment où nous parlons, des recherches sont en cours sur cette langue un peu partout dans le monde. Des chercheurs haïtiens et étrangers travaillent sans relâche ! Et pourquoi ? La réponse est claire ! On ne trouve jamais dans le monde un homme qui fabrique sa langue mais toujours un « homme parlant ». L'expression homme parlant est de Benveniste. Mais le propos du linguiste américain est loin d'être universel car le créole en fait exception. Donc, c'est la seule langue dont on est plus ou moins témoin de son élaboration. En travaillant là-dessus, on pense pouvoir un jour expliquer l'origine de toutes les langues du monde.
Dans ses romans, Lhérisson se propose de prendre en compte les paysans, les déshérités des villes et les chômeurs de toutes les classes relégués au second plan. Il sait, avant tout, qu'il ne peut défendre cette masse sans prendre le parti de valoriser sa langue et sa culture. Mais il sait comment rejeter ce qui met ce peuple en retard. Donc la cécité provoqué par le zèle du fanatisme. Tout compte fait, le romancier n'a point hésiter à accorder la parole à cette masse significative qui soufre de tous les maux et dont le pire est l'injustice et la privation de tout bien- être social.
La fortune de Pitite-Caille
C'est l'un des points faibles du romancier qu'il faut non reprocher mais expliciter. Toute fortune, à mon avis, résulte d'un forfait ou d'un vice que personne ne peut oser dénoncer ou condamner. Lhérisson, sous forme de non-dit, s'interroge sur l'origine de la fortune de « Pitite-Caille ». Mais, s'interroge-t-il sur l'origine des grands capitaux qui, pour se fructifier davantage, exploitent de façon à outrance la force sociale pour la détruire une fois pour toute ? Ne sait-on pas que certains hommes à bonne fortune ont amassé leur argent dans l'immondice avec la complicité de l'Etat ? Cette élite de boue dont nous parlons, ce qui la différencie des voleurs de grand chemin ou du « zenglendo », c'est que l'Etat n'a point manqué de légaliser ses forfaitures. Il est à remarquer ! Ces voleurs de grand chemin ne font pas plus de mal à la société que la plupart des commerçants du « Bord de Mer » et de la « Croix-des-Bossales ». La police et la loi ne poursuivent jamais ces négociants sans pudeur. En revanche, ces larrons que la société appelle voleurs de grand chemin, « déjouqueurs de poules » et d'autres fripons de cette espèce se trouvent constamment en fuite : les forces de l'ordre ne sont pas autorisées à se fermer les yeux sur eux.

A l'exception de Jean-Jacques Rousseau qui deux siècles auparavant s'était, et cela sans succès, engagé à dénoncer ces vols légalisés par la vassalité de l'Etat, personne avant et après lui, il faut le dire, n'a point oser agir ainsi. Autrement dit, tout homme est un aboutissement ! Il faut toujours un concours de circonstance fortuite, profitable à tout point de vue, pour se constituer en homme complet. Cette occasion est rare et « Pitite-Caille » qui en a trouvé une aurait eu tort s'il l'aurait laissée échapper. Le fait, par Lhérisson, de poser le problème de l'origine du capital de Pitite-Caille, est un acte de prudence car un écrivain au talent accompli ne se précipite pas ainsi dans la vassalité littéraire.

Pitite-Caille, par son origine sociale, demeure un de nos héros déshérités. Mais il est probe, plein de mérite et de courage. Fils d'un ancien esclave qui n'avait ni nom de famille ni héritage, Eliezer Pitite-Caille fut un homme courageux. N'ayant été à aucun moment de son existence tenté de se corrompre, pour gagner sa vie, le jeune homme a dû s'essayer à tous les métiers : ferblantier, chapelier, charpentier, menuisier, maçon, cordonnier, marin... Difficile certes, c'est finalement dans la voie maritime que la vie, en fin de compte, lui a souri. Son nom de famille n'a pas trop bonne signification ; son père, d'ailleurs, ne l'a reçu que de ses compagnons d'infortune. Ces derniers, de leur côté, n'ont surnommé ainsi Damvala que parce qu'il a été l'esclave le plus choyé de la maîtresse de leur maître. Après l'indépendance, Damvala n'avait rien puisque la lutte pour le pouvoir n'a pas permis à l'Etat de gérer le social et de rendre à chacun selon son mérite.
La postérité de l'ancien esclave
L'Etat ne se donne jamais la peine de gérer le social. Profitant de ce relâchement si naturel au genre humain, Damvala met au monde, avec la complaisance de quarante-deux « manman pitite », soixante neuf enfants dont quarante filles et vingt-neuf garçons. A l'exception de Eliezer qu'il a eu de « Sor Zinga » sa « femme-caille » l'ancien esclave ne se souciait d'aucun de ses enfants. Comment expliquez un tel abandon de la part d'un père qui a connu les moments inexorables de l'esclavage ? Ne peut-on chercher la cause de ce rejet dans la structure coloniale de Saint-Domingue ? Cette hypothèse a un sens puisque les esclaves, une fois arrivés dans la colonie, ont été brutalement séparés les uns des autres. Les maîtres allaient jusqu'à dire, à peu près en ces termes : « Séparez-les ! L'esclave n'a ni père ni mère ni frère ni enfant ! ». De plus, le fils de l'esclave ne lui appartenait pas en personne : c'était l'un des biens meubles de son maître. Une telle approche permettra de comprendre pourquoi, aujourd'hui encore, bon nombre de pères refusent de prendre en charge leurs enfants.
Seul Eliezer, semble-t-il, a eu la chance de s'émerger parmi les fils de l'ancien esclave. Du reste, il semble avoir fait sa fortune en pleine mer. Et c'est en profitant des valises et des bourses perdues : sans doute, il en fait sien ! Mais y a-t-il là de quoi l'accuser de tous les péchés d'Israël ? S'informe-t-on, déjà, sur l'origine des grands capitaux ? Proviennent-ils tous des efforts honnêtes et continus des gens de bien ? Voilà des questions pleines d'intérêt sur quoi bon gré mal gré chacun a choisi de se taire ! Dans un naufrage, c'est sauve qui peut ! En conséquence, le marin n'était pas obligé de reconnaître les passagers et, du reste, leur communauté d'origine. S'il veut se garder de faire siens marchandises et argent qu'il a pu tenir comme retrouvailles à qui doit-il les rendre si ce n'est à l'Etat ? Et quel Etat ? Cet Etat qui ne sait que voler et réduire les citoyens dans la plus horrible misère ! Rendre à l'Etat les retrouvailles, c'est confier de l'or au clergé pour le « Bon Dieu » qui a horreur de ce clergé et qui, en outre, ne se sert jamais de l'or et d'argent !
En définitive, dans un naufrage, il n'est pas toujours facile de penser à la bourse, et quelque remplie soit-elle. Ce qui compte, c'est la vie ou les funérailles; le rescapé lui-même ne se souvient que d'une seule chose : la façon dont il a survécu au naufrage. Donc, à quelque secteur qu'il en profite, dans ces pages nous ne faisons pas l'apologie du vol. Nous nous contentons plutôt de dénoncer le fait que la société n'arrive pas encore à comprendre les sens de la pensée morale de la fable : « Les Animaux Malades de la Peste » de La Fontaine. Permettez-moi de vous le rappeler : « Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de la cour vous rendront blanc ou noir ! ». Donc, l'inégalité sociale relève d'un mal dont la science juridique et politique n'a pas trouvé le remède. A la recherche de rangs sociauxAvec Velléda, une mambo d'origine martiniquaise, à qui le marin a sauvé la vie et qui devint, cahin-caha, sa maîtresse la fortune de Pitite-Caille est définitivement assurée. Elle fructifiera de jour en jour ! Cependant, cela ne suffit pas. Il faut à ce capital, ajouter le rang; c'est une grande difficulté : ce rang coûte cher ! En outre, il ne se vend qu'à celui qui a outre le nom la culture livresque. Le capital de Eliezer est fait. Mais ce capitaliste parvenu ne s'est pas encore hissé au rang auquel son argent le prédestinerait. C'est un problème auquel Eliezer ne trouvera pas la solution car il est dépourvu de toute culture dans une société où une culture à triple dimension donc livresque, scientifique et technique s'avère nécessaire. Ces trois éléments indispensables de la connaissance universelle, permettant de s'enrichir à long ou à court terme, ne se vendent pas sur le marché. Eliezer est inculte, hélas! Est-ce de sa faute ? La société de l'époque n'a-t-elle pas interdit aux fils d'esclaves d'avoir accès à l'éducation ?
Eliezer, malgré tout, ne s'est pas laissé désarmer. Son premier soin fut de vouloir rompre une fois pour toute avec « Pitite-Caille ». Il voulait être appelé Eliezer tout court. Mais il ne réussira pas car la malignité populaire sera contre lui. Il n'avait qu'à se résigner. Mais la question de rang n'a pas manqué de troubler son sommeil. Prenant l'avis d'un ami, pour être complet, il se fait « franc-maçon ». Et, comme l'a si bien souligné le narrateur, les frais de son initiation ont été énormes.
Projet de candidature
Eliezer n'a pas la tête seulement pour dormir : il en nourrit des rêves plus beaux que l'éternité. Parmi ces desseins, réfléchissons sur celui d'occuper un siège à la chambre basse. Velléda s'y oppose. Ce n'est rien puisqu'à l'époque la femme soumise à l'autorité du mâle ne pouvait être un animal politique. Tout en devenant sa dupe, « Pitite-caille » s'acquiesça volontiers aux conseils de son chef de bouquement, « Boutenègre » et se détourne des avis de son épouse. Dès lors, rien n'est plus cher pour lui que les directives de cet activiste médiocre mais qui ne manque pas de tactique pour le ruiner en un rien de temps. Au reste, à son risque ou à son péril même, Pitite-Caille se porte candidat à la députation pour la circonscription de Port-au-Prince. La décision, une fois prise, Eliezer dépense beaucoup et sa campagne va bon train. Et, avec Boutenègre, pas un candidat n'a eu la popularité de ce politicien novice. Mais loin d'atteindre le but si élevé auquel il prétendait, Pitite-Caille n'a fait que préparer sa ruine et son trépas.Dérapage et conflit électoral

Dérapage et conflit: telles sont les caractéristiques de la procédure électorale en Haïti. Ces caractéristiques s'imposent en traditions les mieux assises. Mais, c'est un mal ! Après deux siècles de persévérance active dans une telle situation dégradante, il devient de plus en plus difficile d'éradiquer ce mal. Car, quand il fait le malheur des uns, ce mal fait le bonheur des autres. Ainsi, c'est ce dont Lhérisson a su donner la preuve.Malgré tout, Pitite-Caille dépourvu de culture représente l'intérêt collectif. Et, qu'il soit héros d'un monde imaginaire ou réel, il a défendu avec la plus noble détermination cet intérêt. Son échec, après tout, est le nôtre : il contribue encore, quoiqu'on puisse objecter de contraire, à nous montrer la gravité de notre situation d'homme. Car, que l'on soit doué d'une vaste culture comme Rosalvo Bobo ou comme Anténor Firmin, il est à remarquer qu'aucun homme politique haïtien ne peut s'élever au-dessus de ce mal incurable pour se mettre à penser le social, si la culture c'est-à-dire l'éducation rate sa vocation. L'histoire de la politique haïtienne, c'est l'histoire qui nous montre la résultante de deux intérêts opposés qui s'affrontent constamment.

La société est porteuse de contradiction ! C'est ce que Rousseau avec le « Discours sur l'Origine et les Fondements de l'Inégalité parmi les Hommes » nous a très bien montré. Cette contradiction posée comme vice ou comme manque ne s'enseigne nulle part ailleurs. Pourtant, chez nous, elle fait l'objet d'un enseignement de première qualité. C'est de cet enseignement, de cette contradiction que Lhérisson avec Pitite-Caille prenant conscience de la déroute de cette classe, est victime. Quant au héros du roman, il n'en est pas victime parce qu'il lui manquait de courage, de conviction ou de consistance. Il est victime parce que les hommes pour lesquels il se battait n'avaient pas la conscience de leur classe ; ils n'avaient pas non plus la conscience révolutionnaire. Ils ne comprenaient pas non plus si les autorités ne voulaient pas que des élections honnêtes eussent lieu et que des hommes probes puissent avoir accès à la machine démocratique. Le dérapage et le conflit électoral ont donc été imminents puisque la charge d'inscrire sur le papier, dans une période de temps très limité, n'a été confiée qu'à une seule personne. Cette oeuvre gigantesque que ce malheureux devait réaliser dans moins d'un mois, il ne pouvait pas le concrétiser dans six mois, en travaillant jour après jour. La plèbe n'est ni une troupeau de mammifères bipèdes ni une légion d'anges ayant perdu leurs ailes. Face à une telle situation, elle réagira. Elle se prépare à renverser la situation ; c'est un bon signe mais la manière de faire est plus réactionnaire que politique. Pitite-Caille, pour calmer la fureur de ses sympathisants, doit prendre la parole.
Dulomond Louis
Professeur de littérature

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